BD/ Le droit du sol, journal d'un vertige
"Le sol est la peau du monde."
Etienne Davodeau
Cette nouvelle BD d'Etienne Davodeau, Le droit du sol, publiée en 2021 aux éditions Futuropolis, est entre le journal de bord et le reportage. On le suit jour après jour dans son périple de 800km, entre 2 lieux significatifs, la grotte de Pech Merle (proche de Cahors) et Bure (proche de Nancy)
« Il se trouve effectivement que mon itinéraire se déroule intégralement dans cette portion du territoire français peu peuplé et mal desservi, que des géographes désobligeants appellent parfois "la diagonale du vide". » E. Davodeau
L’auteur interroge notre rapport au sol, en marcheur-observateur, en partant d’une grotte contenant des peintures rupestres, trésor de l’humanité, et en se rendant jusqu’à un lieu, où des humains vont enterrés des déchets nucléaires.
Il lance l'alerte d'un vertige collectif imminent et invite à un voyage dans le temps et dans l'espace.
« Ici se joue quelque chose qui en dit long sur notre rapport à cette planète et à son sol. Ce n’est rien d’autre qu’une intuition, mais c’est elle qui m’a lancé sur ces sentiers.»
E. Davodeau
C’est une BD très enrichissante car E. Davodeau est parfois accompagné d’amis, de spécialistes (C. Gendrot, B. Laponche, F. Moline, J. Damenjoud ...) qu’il convoque sur ces sentiers, comme Marc Dufumier pour nous narrer l’histoire du sol de notre planète. Ces divers témoignages nous apportent un éclairage sur de nombreux thèmes : le nucléaire et ses déchets, la conservation des documents et du papier, la politique de l’Etat et sa répression sur les ZAD …
« Le nucléaire, c’est la façon la plus dangereuse de faire bouillir de l’eau. » Bernard Laponche
Par ses étapes de marche parfois douloureuses, ce récit est poétique, philosophique, militant et partisan (il le revendique), ce qui le rend fort et marquant.
« Traverser seul des journées de pluie, de vent, de soleil, c’est une façon active et féconde d’apprendre pas mal de choses sur soi, sur ses capacités, sur ses limites, sur ses doutes »
« La douche au vent, c’est l’hygiène du randonneur.» E. Davodeau
C’est aussi une réussite sur le plan graphique, avec l’utilisation du dégradé de lavis gris, d’un trait simple et très efficace, ce qui laisse la place à l’imagination pour la couleur des paysages représentés (monts d'Auvergne, plaines ...)
C’est une BD que je recommande, comme toute l’œuvre de l’auteur !